L’aéroport international Houari Boumédiene est en état de siège.
A l’entrée, sur les pelouses qui longent l’autoroute, des dizaines d’individus sont assis ou allongés.
« Ils nous empêchent de franchir le tunnel pour ne serait-ce que pénétrer dans le parking », explique l’un d’entre eux. « Ils nous disent qu’il n’y a plus de billets pour le stade, que le quota est déjà atteint. Mais qu’ils se les gardent, leurs tickets, nous n’allons pas là-bas pour le match ! Kech ma b’qua match ? Kech ma b’qua sport ? », s’emporte son acolyte. Un autre continue : « Nous leur demandons juste de nous transporter jusqu’à Khartoum. Pour le reste, on peut se débrouiller. Nous y allons juste pour être confrontés aux Egyptiens. »
« Nous sommes là depuis hier soir. Il y a eu du grabuge et ils ont tout cassé à l’intérieur. Maintenant on interdit l’entrée. Nous sommes sur nos gardes car ils ne sont pas commodes », souffle un policier. Les jeunes gens affluent alors vers le groupe formé par les policiers et les journalistes. L’entourant, ils se mettent à huer et à frapper des mains en sautant sur place. Le chef de la brigade intervient alors. « Ecoutez, ce sont des voyous et ils risquent de profiter de cette occasion pour s’enclencher. Il vaut mieux s’éloigner », les exhorte-t-il, lui aussi visiblement exténué par la situation.
Sur les trottoirs, des hommes sont assis, la tête dans les mains. « Nous avons attendu toute la journée d’hier pour avoir un billet. Ils nous ont pris nos passeports et on a patienté jusqu’à 23h », raconte un père de famille. Et ensuite ? « Ce sont des sauvages qu’il y a à l’intérieur. » Et de continuer : « Ils leur ont demandé de faire une file. Et là, ils ont commencé à se presser devant les portes. Ils ont réussi à s’introduire dans les locaux. » « Après, je ne sais plus vraiment ce qui s’est passé. Je sais que je me suis enfui et que les forces antiémeute les ont fait sortir à coups de bombes lacrymogènes », déplore-t-il.
Dans la cohue, des femmes et des enfants qui poussent des chariots avancent, apeurés. « Ma parole, c’est de la folie », s’attriste un agent qui a eu à gérer ce flux continu des heures durant.
« Hier soir, nous leur avons juste demandé de patienter dehors car il n’y avait plus de cartes d’embarquement. Ils se sont énervés, ils ont forcé les portes. Une fois dans le hall, enragés, ils ont cassé l’escalator, la cafétéria, les enseignes et les rideaux des compagnies étrangères. Ils sont même arrivés jusqu’au ‘système’, en haut, qui est pourtant une zone sécurisée. Les casques bleus ont été dépassés », relate-t-il, outré par ces comportements inciviques.
Plusieurs disputes éclatent entre des énergumènes survoltés. L’on en vient même aux mains. Ainsi, un homme « ivre et drogué », diront ses voisins de file, s’en prend violemment à un journaliste présent sur les lieux. Une fois calmé, il crie : « Bien sûr que je suis défoncé… Vous pensez vraiment qu’on va au Soudan sobre ? », sous le regard réprobateur de la foule.
Par Ghania Lassal in El Watan 17/11/2009