Ils évitent les stades, les stations de métro, les boîtes de nuit et les parcs. A Moscou, où ils seraient plus de 10 000, beaucoup d'Africains vivent dans la crainte. D'après un rapport récent de la Moscow Protestant Chaplaincy (MPC, aumônerie protestante) réalisé auprès de 209 personnes, près de 60 % d'entre eux ont été la cible d'agressions racistes en 2009. Un quart précise avoir été attaqué plus d'une fois.
D'après le rapport de la MPC, seuls 23 % des Africains se sont tournés vers les forces de l'ordre après avoir été agressés. Et pour cause : dans l'immense majorité des cas, les recherches n'aboutissent pas faute de preuves. Pire, selon l'étude, il arrive que les policiers profitent de ces plaintes pour extorquer de l'argent aux victimes ou se livrer eux-mêmes à des violences.
Les auteurs des attaques ne sont pas nécessairement des hooligans ou des jeunes gens sous l'emprise de l'alcool. "Contrairement au discours que tiennent les autorités, les passages à tabac sont prémédités et pas forcément le fait de marginaux", dit-elle. Dans la deuxième annexe du rapport, plusieurs témoignages anonymes le confirment : "Les attaques racistes sont très fréquentes, elles peuvent arriver à n'importe quelle heure et dans n'importe quel quartier", "chaque fois que je me trouve avec des Russes, je me fais insulter. Je déteste être noir".
Avant l'arrivée de Poutine les militants nationalistes traquaient les immigrés jusque dans l'enceinte de l'université. "C'était très oppressant pour nous comme pour les Caucasiens et les personnes originaires d'Asie centrale, Tadjiks, Kirghiz et Kazakhs." Mais depuis 2002, la situation semble s'être un peu arrangée. Les chiffres collectés par la MPC montrent une diminution des agressions physiques – 66 % des personnes interrogées disaient s'être fait agresser en 2002 – et une nette amélioration dans la perception des rapports avec la police. "C'est encourageant, note Alexandra Tyson, mais la société russe reste extrêmemnt raciste."